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Blenheim Palace, Angleterre

En 1892, quand Charles Richard John Spencer Churchill devint 9e Duc de Marlborough, il trouva Blenheim dépouillé de tout. Les façades du château donnaient « sur des cours et jardins réduits en champs de foin. » D’énormes travaux furent décidés par le Duc qui, en dépit du traditionalisme anglais, fit alors appel à un artiste français digne de répondre à ses vœux. C’est ainsi qu’Achille Duchêne fut appelé dès 1900 pour la restauration de la cour d’honneur puis plus tard pour la création du jardin français et du jardin italien.

Nordkirchen, Allemagne

Nordkirchen, près de Münster, en Allemagne du Nord, est considéré comme le Versailles de Westphalie. Achille Duchêne fut appelé par Herzog von Arenberg en 1903 et les travaux durèrent jusqu’à la première guerre mondiale. Achille Duchêne écrivait sur Nordkirchen en 1914 : « Le parc de Nordkirchen se présente comme un des spécimens les plus caractéristiques de notre art au XXe siècle. Sa situation en terre étrangère, en Westphalie, donne encore plus de prix à son caractère puisqu’il a été conçu par un architecte français, exécuté par un entrepreneur et des contremaîtres français. De plus, la plupart de ses matériaux viennent de France. Ce parc est réellement le résultat d’une évolution ethnique de notre goût. Les éléments modernes qui entrent dans sa composition, les découvertes botaniques relativement récentes qui ont concouru à son ornementation ne heurtent pas notre conception d’un jardin ancien. Il n’est pas un jardin à la française, mais simplement un jardin français de notre temps. »

Tréport-Terrasse, Normandie, France

En 1873, grâce au chemin de fer, Le Tréport acquiert la célébrité et on y vient de tous les pays. La station rivalise avec Trouville, Étretat ou Saint-Malo. Mais reste une question très préoccupante. Comment le Tréport peut-il s’agrandir adossé comme il l’est à de hautes falaises : le projet des Terrasses allait naître. C’est Haussmann et Alphand qui choisiront l’immense plateau situé entre Dieppe et le Tréport. Ils feront appel à Achille Duchêne pour les jardins. Avec son sens du grandiose, il créa un magnifique parc sur le sommet des falaises sauvages à cent mètres au-dessus de la mer. La presse de l’époque parlait des merveilles du Tréport.
De ce véritable projet d’urbanisme et de ce haut lieu de villégiature anéanti par deux guerres, il ne reste aujourd’hui que les blockhaus laissés par la deuxième guerre mondiale. Sur les Terrasses, on jouait au tennis, au croquet, au football, au hockey, au base ball, on pratiquait le tir au pigeons et on y admirait le paon et sa femelle, une des statues les plus célèbres.

Courances, Île-de-France

« Je ne dirai jamais assez quelle discrétion, quelle sagesse et quelle sûreté ont présidé à la reconstitution des jardins de Courances », écrit Ernest de Ganay en 1921. Il poursuit, « Le crayon de Duchêne a trouvé toute la joie de son art, dans toutes ses études, ses plans, ses vues à vol d’oiseau montrant les grands ensembles : ses dessins en témoignent avec éloquence.»
La finalité d’un projet est ce qui compte, peu importe le temps passé et l’effort consacré à sa réalisation. La secrète histoire de Courances révèle qu’il fallut organiser un véritable combat. Entre 1912 et 1913 on dénombre 3 597 journées d’homme et 370 journées de cheval. Pour planter les arbres, construire les terrasses et planter les canaux, 372 ouvriers, 47 chevaux, 129 charriots métalliques, 10 791 repas furent nécessaires. 27 000 m3 de terre durent être déplacés. En deux ans, les propriétaires ont dépensé une somme équivalente à 3 800 000 euros. De 1899 à 1913, les Duchêne ont passé eux-mêmes 177 journées dans le domaine. Ernest de Ganay aimait comparer Achille Duchêne au Napoléon des jardins.

Jardin de M. Higgins, Paris

Résidence de l’Ambassadeur des État-Unis en France, place d’Iéna, Paris 16e, 1907.
Le jardin est sur une terrasse qui domine Paris. La vision de l’artiste ne peut être que globale. La topographie des lieux donne naissance à la conception et en même temps la conditionne. Le jeu des rapports de volume clairement voulu par Achille Duchêne concourt à l’équilibre général qui dépend de la hauteur de la tour Eiffel si présente ici. Caprice d’un propriétaire, la grotte romantique, inspirée d’Hubert Robert, évoque un  voyage imaginaire et pittoresque au cœur de la ville. Dans le sillage des jeux olympiques, le sport est de nouveau à l’honneur et Achille Duchêne aura l’audace de construire un terrain de tennis sur l’herbe en plein Paris.

Ambassade d’Autriche, actuel Hôtel Matignon, 1907, Paris

Dans ce jardin composite infiniment original de par sa géométrie ordonnée qui plonge dans le jardin paysager, on peut admirer, à la place d’un miroir d’eau, un grand tapis vert au léger vallonnement où viennent s’échouer des vagues imaginaires de fleurs blanches au pied des massifs. Le magnifique portique de treillage est dessiné par Achille Duchêne pour adjoindre une perspective au jardin clos. Il fit preuve d’une ingéniosité rare pour adapter le jardin à son usage : il disposa des coulisses rythmées de chaque côté de la pelouse pour assurer les réceptions en plein air, implanta des bosquets ouverts, destinés, l’un aux conversations en aparté, l’autre aux goûters, l’autre aux orchestres.

Vaux-le-Vicomte, Île-de-France

A partir de leur création par Le Nôtre, en 1652, les jardins de Vaux-le-Vicomte connurent trois projets successifs qui étendirent le domaine jusqu’aux dimensions qu’il atteignit en 1661, et ils comptèrent de nombreuses campagnes de travaux postérieures qui adaptèrent les parterres aux goûts de chaque génération. Au sein de ces interventions parfois considérables, celle d’Henri et particulièrement celle d’Achille Duchêne comptent parmi les plus spectaculaires, et parmi celles qui ont le plus contribué aux dispositions actuelles du jardin.

Lire la suite “La réinvention des parterres de Vaux”, Jacques Moulin in “Le Style Duchêne”.

Treillages

C’est vers les années 1900-1910 que les treillages réapparaissent dans les restaurations de certains parcs et jardins. Dès lors, les créations de treillage signées Duchêne font renaître un art tombé dans l’oubli à la fin du XVIIIe siècle : l’architecture de treillage. Bien que les matériaux et décorations ne soient plus les mêmes que par le passé, les Duchêne réalisent d’importants ouvrages, accompagné notamment du savoir-faire des treillageurs Tricotel.
On leur doit notamment la décoration en treillage des salons intérieurs du Palais Rose pour Boniface de Castellanne, avenue Foch à Paris, les portiques des treillages de Baillon, de Condé-sur-Iton, le treillage “salon Madame” de Champs, la décoration intérieure et extérieure de la villa Trianon à Versailles pour Elsie de Wolfe (Lady Mendl), décoratrice américaine qui exportera avec succès le style treillage aux États-Unis.
Pour ses clients étrangers, Achille Duchêne réalisera des œuvres majeures d’architecture de treillage. On peut citer ceux de Nordkirchen en Allemagne, de La Fougeraie et de Herzèle en Belgique, Stenockerzeel en Hollande, Paington en Angleterre. Aux États-Unis, il réalisa en Californie le treillage d’un jardin espagnol et celui pour le domaine Carolands et à Long Island le treillage d’un bosquet de la philosophie.
En véritables initiateurs de la renaissance du treillage, les Duchêne seront suivis par de nombreux autres architectes-paysagistes : Jules Vacherot pour le jardin de Potin à Neuilly-sur-Seine, Edouard-André pour le pavillon de treillage de la roseraie de l’Haÿ-les-Roses. Ferdinand Duprat et Jacques Gréber, formés auprès d’Achille Duchêne, réalisent le treillage de l’Hôtel Cassini, rue de Babylone à Paris. Jean-Claude Nicolas Forestier plaide pour la réintroduction des treilles dans le jardin sous forme de pergolas comme à Bagatelle ou à l’Haÿ-les-Roses. Puis, dans le style Art Déco, naîtront d’autres treillages sous les signatures de Pierre-Émile Legrain, Jean-Charles Moreux, Le Corbusier, Gabriel Guévrékian, André Lurçat ou André Véra.